Voici un livre que j'ai beaucoup aimé mais pas pour les raisons que je supposais au départ :
"En 1951, Elisabeth "Lise " Lévitzky épouse Lucien Lulu Ginsburg. S'ensuivront 10 ans de mariage puis 30 ans de rendez-vous clandestins. Du jour de leur rencontre, le 5 mars 1947, à ce 5 mars 1991. où elle accompagne sa dépouille au cimetière du Montparnasse. Lise a ainsi vécu plus de 40 ans d'amour, de disputes et de retrouvailles avec Serge Gainsbourg : une sorte de Je t'aime moi non plus avant Bardot et Birkin. 44 années durant. Pour la première fois, dans ce livre, elle raconte l'époque où, pauvre et inconnu, le jeune Lucien Ginsburg rêvait de devenir peintre. Elle retrace l'apprentissage de l'auteur-compositeur et dévoile le secret de chansons célèbres comme Le Poinçonneur des Lilas. Elle révèle enfin pourquoi Lucien a choisi de devenir Serge, pourquoi il a abandonné la peinture et pourquoi il a, plus tard. réécrit son passé. En montrant Serge Gainsbourg sous un jour inédit, le récit de leur histoire d'amour hors norme constitue la pièce manquante du puzzle qui permet de mieux comprendre la vie et l'oeuvre de l'un des plus grands génies de la chanson française."
Bien sûr, même si presque galvaudé de le revendiquer, j'ai toujours adoré le travail de Gainsbourg. Pour cette raison, j'ai souffert d'ailleurs d'avoir été adolescente dans les années quatre-vingt et d'avoir longtemps gardé en mémoire les images de Gainsbarre qui faisait florès sur les chaînes de télévision de l'époque. Bien sûr, j'ai lu les biographies qui lui ont été consacrées. Néanmoins, je n'y ai jamais retrouvé la franchise et la lucidité de Lise LEVITZKY, et pour cause. Elle, c'est Lucien qu'elle a connu et qu'elle n'a cessé de connaître. Sur lui, elle pose un regard à la fois tendre et agacé, mais toujours acéré. Elle était à ses côtés lorsque le jeune étudiant peintre s'est mué en chanteur et auteur à succès, elle l'a jugé, lui a dit, mais est toujours restée.
Mais au-delà du témoignage de "celle qui fut la première femme de Gainsbourg", ce livre est le récit d'une vie, celle d'une femme libre, née dans la première moitié du vingtième siècle et qui a vécu ainsi, en amazone. Féministe avant l'heure, indépendante, artiste et engagée dans son siècle, Lise LEVITZKY offre à travers son livre un document : une vie de femme, tout simplement.
On me demande parfois, d'ailleurs, si Lucien ressemble à Gainsbarre, le sale type qu'on a vu à la télé. Evidemment, c'est un rôle, un personnage fabriqué, un ivrogne qui dit des gros mots et qui a de l'argent. Les gamins sont au chômage, tout le monde leur répète que leur avenir est bouché, on leur dit de se conduire correctement pour trouver un boulot et de faire attention au sida. Ils s'emmerdent. Alors ils apprécient que quelqu'un transgresse à leur place. Et voilà Gainsbarre qui arrive en leur disant qu'il baise à droite et à gauche avec des filles et des garçons. Il est toujours bourré, il dit des horreurs. Ce ne sont pas de grosses transgressions. Certains livres disant que c'est un pervers. Mais pas du tout ! La perversité, c'est faire le mal pour le plaisir, et Lucien n'a jamais été ainsi. Mais il se trouve qu'en France on adore les ivrognes. On les encourage à boire. D'une certaine manière, il s'est retrouvé prisonnier de Gainsbarre, de l'alcool, en même temps qu'il s'était construit un univers cohérent et parfait rue de Verneuil, un univers d'où il lui était impossible de s'échapper. Maintenant, il est là-bas comme une araignée au centre de sa toile.
Lise LEVITZKY (avec Bertrand DICALE), Lise et Lulu, 2010.
Lise et Lulu
Lise Lévitzky