La soupe "des Biches"
Ah, ah, le titre énigmatique que voilà ! Quelles biches, allez-vous dire ? Eh bien, celles du film de Claude CHABROL, sorti en 1968.
Mais pourquoi Chabrol, allez-vous alors vous enquérir ?
Tout simplement parce que j'ai découvert un livre tout à fait original qui lui a été consacré : Chabrol se met à table, de Laurent BOURDON.
"Truffée d'anecdotes recueillies derrière la caméra, cette étude, précise autant qu'amusante des cinquante-sept films du cinéaste, est l'occasion d'une découverte de son oeuvre côté cuisine. Cinquante années de balade gourmande sur grand écran. Du pâté de la mère Chaunier dans Le Beau Serge à la pintade au chou de Bellamy en passant par le ragoût de mouton que Que la bête meure, le fricandeau à l'oseille des Fantômes du chapelier et la lamproie à la bordelaise de La Fleur du mal, l'appétit vient en lisant !"
Cinéma et littérature, le mariage ne pouvait que me plaire ! Et il m'a plu. Pourtant, je l'avoue, je ne suis guère familière du cinéma de Claude Chabrol. Trop étiqueté pour moi "Nouvelle vague" puis "ex-nouvelle vague" ! Néanmoins, je reconnais que plonger dans son univers culino-cinématographique m'a donné envie de plonger dans son univers tout court. Ainsi cet extrait d'entretien au début du livre :
Laurent Bourdon : Quelle est la véritable signification de la nourriture dans vos films ?
Claude Chabrol : C'est tout simple : Si les personnages ne mangent pas... ils meurent ! Donc, je les fais manger. Et puis, c'est un moment particulier, car c'est à table que l'on ment le plus mal. Difficle de mentir la bouche pleine, donc, évidemment, les masques tombent, le vernis craque, le naturel reprend le dessus, appelez ça comme vous voudrez, mais ces moments passés autour d'une table permettent un certain relâchement tout à fait propice à la dramaturgie. [...] c'est vrai que j'aime ces scènes qui mettent véritablement à nu les personnages. Il faut retirer son masque pour manger !
Mais revenons à notre soupe. Rien de bien extraordinaire ni de très innovateur, mais une simplicité de bon aloi. J'ai ajouté ma touche personnelle en faisant revenir quelques graines de courge et en supprimant la crème fraîche (le lait et le beurre suffisaient...). Voici donc la :
SOUPE DES "BICHES"
Pour 4, il faut :
- un kilo de potiron
- 50 g de beurre
- 50 cl de lait
- 50 cl de bouillon de volaille
- 2 pommes de terre farineuses
- une cuillère à café de sucre semoule
- des graines de courge
- une cuillère à soupe d'huile de sésame
- sel et poivre
Éplucher le potiron et couper la pulpe en gros dés de trois centimètres environ.
Faire fondre le beurre dans une cocotte et y faire revenir les dés de potiron sur feu doux. Saupoudrer de sucre semoule, saler et poivrer. Couvrir et laisser étuver à feu doux pendant cinq minutes.
Faire chauffer séparemment le lait et le bouillon de volaille. Peler les pommes de terre, les laver, les épongeret les couper en dés.
Verser le lait puis le bouillon dans la cocotte avant d'ajouter les pommes de terre et de laisser cuire une heure à couvert sur feu doux.
Mixer le tout et assaisonner à nouveau si besoin.
Dans une poêle, faire revenir des graines de courge avec un peu d'huile de sésame.
Servir la soupe saupoudrée de graines.
Remarques :
- Pour la petite histoire, dans le film, la fameuse soupe est immangeable, car "trafiquée"...
- Je craignais un peu sa "richesse", mais elle est juste veloutée comme il faut !
Commentaires
J'aime beaucoup le cinéma de Chabrol, dans lequel les plats sont très souvent à l'honneur. et l'idée de pouvoir confectionner les plats présentés dans les films est très alléchante ! Merci pour cette découverte !!!
J'ai toujours trouvé que les livres de recettes qui marient gastronomie et ..écrivains, peintres ou autres artistes, étaient agaçants d'artificialité. Pour Chabrol, c'est tout le contraire, il n'y a pas de grosse ficelle, de "recette" ..mais des recettes, des vraies sûrement car le rapport entre lui et la (bonne) bouffe est évident !
Tiens d'ailleurs dans la dernière interview que j'ai lue de lui, il parlait de miss Huppert et tout ce qu'il trouvait à lui reprocher c'est.. qu'elle ne mange pas ! :)
@ Marie : je suis assez d'accord avec toi ; ce type d'ouvrage est souvent snob (en ce qui concerne les recettes) et tiré par les cheveux (en ce qui concerne les œuvres). Ici il n'en est rien : la cuisine est une "vraie" cuisine !
PS : et il évoque dans l'entretien Isabelle Huppert qui l'agace avec son appétit d'oiseau !
zut, je viens de faire de la soupe au potiron...mais ce livre a l'air très alléchant, on doit y retrouver tout la verve et la truculence de Chabrol!
Un des plus glauques films de Chabrol, mais pour la gourmandise, je pense spontanément aux fantômes du chapelier...